mereim constontine
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mereim constontine
A celle qui est voilée
Tu me parles du fond d’un rêve
Comme une âme parle aux vivants
Comme l’écume de la grève
Ta robe flotte dans les vents
Je suis l’algue des flots sans nombre
Le captif du destin vainqueur
Je suis celui que toute l’ombre
Couvre sans éteindre son coeur
Mon esprit ressemble à cette île
Et mon sort à cet océan
Et je suis l’habitant tranquille
De la foudre et de l’ouragan
Je suis le proscrit qui se voile
Qui songe, et chante, loin du bruit
Avec la chouette et l’étoile,
La sombre chanson de la nuit
Toi n’es-tu pas comme moi-même
Flambeau dans ce monde âpre et vil
Ame, c’est-à-dire problème
Et femme, c’est-à-dire exil
Sors du nuage, ombre charmante
O fantôme laisse-toi voir
Sois un phare dans ma tourmente
Sois un regard dans mon ciel noir
Cherche-moi parmi les mouettes
Dresse un rayon sur mon récif
Et dans mes profondeurs muettes
La blancheur de l’ange pensif
Sois l’aile qui passe et se mêle
Aux grandes vagues en courroux
Oh, viens ! tu dois être bien belle
Car ton chant lointain est bien doux
Car la nuit engendre l’aurore
C’est peut-être une loi des cieu
Que mon noir destin fasse éclore
Ton sourire mystérieux
Dans ce ténébreux monde où j’erre
Nous devons nous apercevoir
Toi, toute faite de lumière
Moi, tout composé de devoir
Tu me dis de loin que tu m’aimes
Et que, la nuit, à l’horizon
Tu viens voir sur les grèves blêmes
Le spectre blanc de ma maison
Là
méditant sous le grand dôme
Près du flot sans trêve agité
Surprise de trouver l’atome
Ressemblant à l’immensité
Tu compares, sans me connaître
L’onde à l’homme, l’ombre au banni
Ma lampe étoilant ma fenêtre
A l’astre étoilant l’infini
Parfois, comme au fond d’une tombe
Je te sens sur mon front fatal
Bouche de l’Inconnu d’où tombe
Le pur baiser de l’Idéal
A ton souffle, vers Dieu poussées
Je sens en moi, douce frayeur
Frissonner toutes mes pensées
Feuilles de l’arbre intérieur
Mais tu ne veux pas qu’on te voie
Tu viens et tu fuis tour à tour
Tu ne veux pas te nommer joie
Ayant dit : Je m’appelle amour
Oh fais un pas de plus ! Viens, entre
Si nul devoir ne le défend
Viens voir mon âme dans son antre
L’esprit lion, le coeur enfant
Viens voir le désert où j’habite
Seul sous mon plafond effrayant
Sois l’ange chez le cénobite
Sois la clarté chez le voyant
Change en perles dans mes décombres
Toutes mes gouttes de sueur
Viens poser sur mes oeuvres sombre
Ton doigt d’où sort une lueur
Du bord des sinistres ravines
Du rêve et de la vision
J’entrevois les choses divines
Complète l’apparition
Viens voir le songeur qui s’enflamme
A mesure qu’il se détruit
Et, de jour en jour, dans son âme
A plus de mort et moins de nuit
Viens ! viens dans ma brume hagarde
Où naît la foi, d’où l’esprit sort
Où confusément je regarde
Les formes obscures du sort
Tout s’éclaire aux lueurs funèbres
Dieu, pour le penseur attristé
Ouvre toujours dans les ténèbres
De brusques gouffres de clarté
Avant d’être sur cette terre
Je sens que jadis j’ai plané
J’étais l’archange solitaire
Et mon malheur, c’est d’être né
Sur mon âme, qui fut colombe
Viens, toi qui des cieux as le sceau
Quelquefois une plume tombe
Sur le cadavre d’un oiseau
Oui, mon malheur irréparable
C’est de pendre aux deux éléments
C’est d’avoir en moi, misérable
De la fange et des firmaments
Hélas ! hélas ! c’est d’être un homme
C’est de songer que j’étais beau
D’ignorer comment je me nomme
D’être un ciel et d’être un tombeau
C’est d’être un forçat qui promène
Son vil labeur sous le ciel bleu
C’est de porter la hotte humaine
Où j’avais vos ailes, mon Dieu
C’est de traîner de la matière
C’est d’être plein, moi, fils du jour
De la terre du cimetière
Même quand je m’écrie : Amour
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